N°492 Algérie : Les journalistes français complaisants ou faibles en arithmétique?
Les résultats des élections présidentielles, annoncés dimanche soir par l’Agence nationale indépendante des élections (Anie), aussi choquants qu’incohérents, immédiatement contestés en Algérie, mais pas en France.
Bien que les résultats des élections présidentielles en Algérie, annoncés dimanche soir par l’Agence nationale indépendante des élections (Anie), aient été aussi choquants qu’incohérents, les journalistes français les ont reçus avec une complaisance confondante, tandis que Emmanuel MACRON a adressé immédiatement à son homologue algérien Abdelmadjid TEBBOUNE ses « plus vives félicitations » pour sa réélection.
La Croix le 9 septembre : La Kabylie s’est remise à voter
Le Figaro le 9 septembre : Algérie : TEBBOUNE réélu avec 94,65 % des voix
Libération le 9 septembre : Algérie : le président sortant Abdelmadjid TEBBOUNE réélu avec 94 % des voix
Wikipédia le 9 septembre : Élection présidentielle algérienne de 2024
Les résultats des élections de 2024 sont incohérents et impossibles . Comment les journalistes français ont-ils pu reprendre les données de la commission électorale algérienne, évidemment fausses ?
Le président Abdelmadjid TEBBOUNE : coquin mais malin
Dès l’annonce des résultats, contrairement aux journalistes et au président français, Abdelmadjid TEBBOUNE fit savoir immédiatement qu’il refusait d’accepter les chiffres tels qu’on les lui proposait.
Pour complaire à leur président candidat, les services administratifs algériens ont tenu à lui organiser de « belles élections ». Comme tous les faussaires, ils sont partis du résultat qu’ils voulaient obtenir : près de 95 % de voix pour le président sortant, et un taux de participation approchant les 50 %.
Restait juste à faire voter les algériens, ou à leur faire accroire qu’ils l’avaient fait.
Il est vite apparu que les urnes avaient du mal à se remplir.
Les services administratifs algériens ont-ils eu alors la faiblesse de truquer, à la hâte, la compilation des résultats censés provenir des diverses willayas?
Le truquage est en effet si grossier, que le président algérien n’a surtout pas voulu faire la bêtise de lui apporter sa caution. Les chiffres sont si farfelus, qu’il s’est vite rendu compte, qu’ils cachaient probablement, très mal, un piège.
C’est pourquoi, de façon totalement inédite, Abdelmadjid TEBBOUNE, élu dès le premier tour avec 94,65 % des suffrages exprimés et un taux de participation « déclaré » de 48,03 %, a refusé les résultats, à l’instar de ses deux concurrents.
Les médias français arrivent enfin à voir ce qu’ils voient
Il aura fallu 24 heures aux médias français, il aura fallu que le président algérien leur ouvre personnellement les yeux, pour qu’ils fassent état de fraude électorale massive et grossière lors des élections présidentielles en Algérie. Les services chargés des élections électorales en Russie ont été accusés de fraudes par les journalistes français alors que les additions tombaient justes. Les Russes qui fraudent, eux, savent compter.
Paradoxalement les médias français qui ont vu des fraudes électorales cachées en Russie, se sont malheureusement montrés incapables de relever des fraudes évidentes en Algérie. Ou pire, n’ont surtout pas voulu en faire état. De peur de qui ? Ou de peur de quoi ?
Les journalistes français ont bien sûr raison de ne rien faire qui puissent froisser le gouvernement algérien, mais ils doivent aussi penser à ne pas mépriser l’intelligence mathématique du peuple algérien.
Article d’Adam ARROUDJ publié dans Le Figaro le 10 septembre 2024
« Une situation politique sans précédent. » Dans les petits cercles algérois où se croisent militants et observateurs de la vie politique, le constat était unanime, lundi matin, après une bien étrange nuit. Alors que l’Algérie s’était endormie avec un président, Abdelmadjid TEBBOUNE, réélu avec 94,65 % des voix, elle s’est réveillée avec une fronde générale contre l’Agence nationale indépendante des élections (Anie).
Un peu avant une heure du matin, les directions de campagne des trois candidats – Abdelmadjid TEBBOUNE, Abdelaali Hassani CHERIF (islamiste) et Youcef AOUCHICHE (FFS, laïc) – ont, dans un communiqué commun, dénoncé les « imprécisions », les « contradictions », les « ambiguïtés » et les « incohérences » dans les chiffres donnés par l’Autorité. Lors de l’annonce des résultats provisoires, son président, Mohamed CHORFI, a en effet communiqué les scores des candidats sans donner le taux de participation. Après la fermeture des bureaux de vote samedi, l’Anie avait évoqué une « moyenne de participation » de 48,03 %. Or, selon l’Autorité, si seuls 5,63 millions de votes ont été enregistrés sur un corps électoral de 24 millions de votants, le taux de participation serait plutôt proche de 23 %. « Un quart de l’électorat est un chiffre qui a du sens, estime un connaisseur des rouages électoraux en Algérie. Cela correspond au socle du système, c’est-à-dire les corps constitués (armée, police, administration) et la clientèle du pouvoir. »
Abdelaali Hassani CHERIF (MSP) a parlé lundi en conférence de presse de « fraude » et de « mascarade ». Le candidat, crédité de quelque 178 000 voix, en revendique 500 000. Youcef AOUCHICHE (FFS) a lui aussi convoqué les médias pour détailler les « irrégularités » dont il s’estime victime. Officiellement, il n’aurait obtenu que 122 000 voix, il en revendique un peu plus de 300 000.
Les deux partis rapportent la même anomalie : les résultats des bureaux de vote diffusés par l’Anie ne correspondent pas à ceux des procès-verbaux validés par cette même autorité. « Il semblerait que tout se passe bien dans les bureaux de vote, mais qu’une fois les procès-verbaux entre les mains des wilayas (préfectures, NDLR), les chiffres soient changés », témoigne le directeur d’un bureau de vote à Alger qui avait déjà relevé ce genre de dysfonctionnement lors des législatives de 2021. D’autres témoignages d’acteurs de la campagne diagnostiquent plutôt le malaise au siège de l’Anie à Alger.
« Alors que cette élection devait asseoir la légitimité du chef de l’État, elle le fragilise. Non seulement il n’obtient pas le plébiscite attendu, puisqu’en gros 75 % des Algériens qui auraient dû voter se sont abstenus, mais il apparaît otage de son administration », relève un militant de l’opposition.
« Cette opacité nous inquiète »
Le journaliste algérien Otmane LAHIANI estime qu’en rejetant les chiffres de l’Anie, « le président a refusé un cadeau empoisonné ». Il qualifie la déclaration des trois candidats de « dangereuse politiquement ». « Elle sape le processus électoral et remet en cause sa transparence. Elle admet clairement l’existence de manipulations dans les chiffres et les résultats, et pose des questions sur la crédibilité de l’autorité électorale. » Le sociologue Nacer DJABI est du même avis : « Cette crise confirme ce en quoi je crois depuis des années : l’Algérie a besoin d’une réforme sérieuse de son système politique pour construire des institutions politiques légitimes, en ouvrant l’espace des libertés médiatiques et politiques. »
Jusque dans les rangs de l’opposition, qui n’écarte pas l’hypothèse d’une manœuvre interne pour déstabiliser le chef de l’État, une certaine angoisse est perceptible. « Cette opacité autour des résultats nous inquiète », a déclaré le candidat malheureux du FFS. « Tout cela nous dit une seule chose, assure encore un cacique de la politique. Que le deuxième mandat de TEBBOUNE ne sera pas tranquille. »
[Le 11 septembre 2024, 10 H40, J. A., La Grande-Motte] : Très bon article comme toujours !!
[Le 10 septembre 2024, 17 H55, J-M. R., Alet-les-Bains] : Comme suite à la réélection aux chiffres farfelus de TEBBOUNE et sur le plateau de la chaine officielle algérienne TV2, ex Canal Algérie, la journaliste présentatrice se défend contre les critiques de la presse française (qui pourtant semblait bien complaisante au début), assénant des propos véhéments à l’encontre de la France :
« L’Algérie est un grand pays de libertés, stable et prospère […], très loin de la colonie de misère (Ah bon !) dont vous [les Français] avez été chassés […] » Et de poursuivre, avec des mots teintés de ressentiments : « L’Algérie est beaucoup mieux lotie que la France […] L’Algérie des années 2020 est un pays doté d’institutions légitimes et stables au moment où la France est devenue un pays ingouvernable. » La journaliste adresse également une pique virulente, s’agissant de l’état préoccupant de l’endettement public français : « L’Algérie est un pays qui n’a pas un centime de dette, au même moment où la France, avec plus de 3.000 milliards de dette, figure dans le top 5 des pays les plus endettés en Europe ». Pour TV2, « la France est devenue la risée du monde. » (citation de Bd Voltaire).
Certes, elle n’a pas tort sur tous les sujets concernant l’état consternant de la France actuelle. Toutefois, pour le reste, Il y a une réponse toute simple à donner à l’Algérie : si elle est un pays aussi libre et aussi riche que ses porte-paroles officiels le disent, pourquoi diable (sheïtan) y a-t-il donc tant d’Algériens en France et qui continuent à y affluer, au lieu de se précipiter pour retourner vivre dans le pays de cocagne que serait devenu leur pays d’origine ? Il faut croire que tous les Algériens ne partagent pas ce tableau idyllique. Et pas seulement les Kabyles et autres Berbères du Sud.
[Le 10 septembre 2024, 17 H45, J. B., Paris] : Très beau commentaire. Effectivement les journalistes n’OSENT pas dès qu’il s’agit de l’Algérie
[Le 10 septembre 2024, 13 H00, N. N., Nantes] : On peut noter sur la photo de l’article publié dans Le figaro que l’urne est vide et que la femme qui vote est bien seule.
Un taux de participation d’un électeur sur deux est très improbable.
[Le 10 septembre 2024, 12 H00, P. C., Notre-Dame de la Rouvière] : Les Français ont toujours montré une tendresse et une faiblesse particulière pour l’Algérie. Certains voulaient même faire de ses habitants des Français à part entière.